La situation historique actuelle appelle plus que jamais un renforcement du bouclier psychologique des professionnels de la sécurité et de la défense et, pour ne pas prendre le mur et rester endurant, la nécessité impérieuse de penser et d’agir autrement. Les cellules de soutien psychologique ouvertes aux citoyens sur l’ensemble du territoire sont importantes, mais le support psychologique concerne aussi tous les professionnels de la sécurité et de la défense.
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Car il va falloir aller au-delà de la résistance, c’est-à-dire vers un état d’endurance et de résilience. La force mentale est l’arme suprême en période de bouleversements et de changements. Sport, nutrition saine, entraînements psychologiques et débriefings sont vitaux, tout comme le sera un management réaménagé en temps de crise, qui laissera de la place à ceux qui ont des propositions à faire, des actions à recommander. Écoutez-les ! Ils font partie du dispositif global.
Écoutez-les, y compris et surtout s’ils ne sortent pas des mêmes grandes écoles que vous, même si leurs comportements ne ressemblent en rien aux vôtres et qu’ils viennent d’autres disciplines. Le mélange des générations, des cultures et l’interdisciplinarité forment la seule réponse aux crises systémiques.
L’intégration des Digital natives [1] (diplômés ou pas) est vitale dans le dispositif global de gestion de la crise qui nous touche. Il est question de peuples connectés. Les jeunes sont nés dans ce contexte et le connaissent parfois mieux que les surdiplômés de la génération précédente qui occupe les postes de décision. Ils peuvent aider à « dé-rigidifier » certains comportements inadaptés ancrés depuis longtemps.
Ils ne sortent pas toujours d’écoles prestigieuses et sont parfois mêmes autodidactes. Ils ont cependant toute leur place car ils viennent du terrain et présentent l’avantage de ne pas avoir été conditionnés par des programmations pédagogiques qui ont fait d’eux des analystes d’analyses. Le commandement est nécessaire à condition qu’il focalise sur l’intérêt général et reste souple comme le vent, avec l’esprit large et ouvert.
L’élite sécurité-défense de la Nation de demain n’aura pas le même visage que celui d’aujourd’hui.
Les armements émotionnel et psychologique vont jouer un rôle fondamental dans l’évolution qui nous est absolument nécessaire.
Détenir un diplôme ou un grade n’a jamais aidé à construire la sécurité et la défense d’un pays. L’engagement, l’expérience, l’action, la raison d’État, le patriotisme, le contrôle des émotions, si.
La culture universitaire et la formation, si elles ne sont pas éprouvées sur le terrain à travers des expériences concrètes, ne servent à rien. La connaissance doit donner des idées et celles-ci doivent se traduire en actes avec, à la clé, des résultats évaluables.
Comprendre est important mais agir l’est encore plus. Cette dynamique n’est pas forcément enseignée dans les écoles. Le « travailler ensemble » et dans le respect de chacun avec ses différences reste un combat de chaque jour. Cela est anormal et traduit un manque de travail sur l’état d’esprit ainsi qu’une absence de prise de conscience de l’intérêt général, accompagné de replis égotiques dangereux, notamment lorsqu’il est question de sécuriser des populations.
L’intellectualisme et le carriérisme ne doivent pas devenir des addictions.
La notion de temps a changé : le tout est possible est là, nous informant que si nous ne changeons pas très rapidement de comportements et de postures, le pire devient possible. Arrêtons de nous laisser guider par la réussite personnelle. Revenons à la connexion au collectif.
Il faut réussir en atteignant les objectifs et pas seulement en fonction d’une trajectoire de carrière. L’histoire le montre : les décisions et les actions viennent maintenant des deux camps : l’État et les citoyens, pour la défense de leur pays, et la problématique se mondialise.
Sans actions concertées du corps social qui mute car il est en attente de réponses rapides à des frappes rapides avec celui du politique qui doit donc s’adapter en termes d’agilité, l’un ou l’autre peut se retourner contre l’un et l’autre si l’intérêt général n’est pas la cible.
Les objectifs doivent répondre à des critères qui les rendraient « communs » parce-que nobles, inspirants, porteurs de projets d’avenir, pacifiques, attractifs et universellement reconnus par tous les humains (ou par les concitoyens si l’on parle d’abord d’un objectif pour la Nation ou pour l’union des Nations) et qui redonnerait le goût de l’effort et la forte envie de réussir ensemble.
Ce pourrait être, par exemple, au travers d’un grand projet commun, celui de protéger la planète et nos conditions de vie tout en nous préparant à long terme à explorer au-delà de notre berceau. Toutes les récentes annonces de possibilités de développement de vies extra-planétaires par de nombreuses puissances mondiales, ne sont-elles pas des signaux supplémentaires indiquant que notre Terre pourrait atteindre un tel niveau de dégradation qu’il nous faudra partir, oui mais à combien ? Et dans quelles conditions, pour sauver notre espèce ?
La nécessité de penser autrement dès maintenant, s’impose avec une force implacable. L’inertie serait dangereuse et morbide.
Dr. Isabelle Tisserand, anthropologue médical
[1] http://www.amazon.fr/Hacking-coeur-Les-enfants-num%C3%A9rique/dp/2846080860
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