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Les Enfants du numérique, épisode 1 : la petite section - EchoЯadar

A l’heure où se créée la Grande École Numérique en France [1], Isabelle Tisserand et Danièle Fescia se penchent sur ce qui se passe dans le terreau de formation des individus connectés dès leur plus jeune âge, c’est-à-dire en maternelle, à partir de deux ans.

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Danièle Fescia, institutrice, est l’une des dernières femmes [2] à avoir été formée à l’École Normale et dont le maître formateur en maternelle fût Régine Bramnik [3]. Elle a généreusement accepté de répondre à une interview pour partager ce qu’elle observe dans l’école où elle enseigne, à propos des petites sections.

Nous sommes sur la côte Ouest de la France. Le terrain de prédilection de Danièle Fescia, forte de vingt-sept ans d’expérience professionnelle et d’années de direction d’école maternelle, est la petite enfance car c’est à ce stade, dit-elle, « que l’on travaille le plus avec ses mains et que se forment les bases structurantes de l’éducation et donc de la personnalité agissante dans le foyer, la société, le pays ».

La première année d’école est un travail de mise en confiance des parents : ils laissent à une tierce personne, inconnue et non choisie (contrairement à la nourrice), un rôle éducatif majeur.

Maternelle

Ce qui ressort de façon évidente à l’écoute active de cette spécialiste de la petite enfance est que le « Care »[4], l’attention portée à la fois au collectif que forment les petites sections et à la personnalité de chacun de ses membres, est l’une des principales clé de réussite dans l’éducation.

« L’école maternelle doit être « maternelle » et surtout, le rester. Ses principaux objectifs sont de faire se développer chez le tout petit l’autonomie, la réflexion et le vivre ensemble afin qu’il devienne un individu responsable, harmonieux, adaptable à la société et au monde ».

Danièle Fescia rappelle que le métier d’institutrice en maternelle est principalement exercé par des femme [5]. Elle insiste également sur le fait que tout adulte se souviendra fortement de certains agents de l’éducation : la maîtresse, « l’instit », le professeur : « nous sommes tous « marqués » par certains enseignants, par leur façons de faire, ou par le lien tissé avec l’élève. Soit ils nous ont aidé à nous révéler et à nous fortifier, soit ils nous ont abîmés, fragilisés et nous ont totalement démotivés. Ceux dont l’enfant et l’adulte – qu’il doit devenir – se souviennent, sont ceux qui lui ont donné du « Care », de l’attention avec empathie, de l’écoute et qui lui ont donc porté une attention à caractère individuel. On parle ici de l’institutrice respectant la nature profonde de l’enfant-élève, qu’il soit scolaire ou non, sachant que s’il ne l’est pas, c’est parce que le système scolaire ne lui est pas adapté. Cela est très important : on peut mesurer, des années et des années après, les dégâts occasionnés par de telles situations dans les vies professionnelles des adultes. Par exemple : inhibition de la créativité, conflits avec le management, frustrations, pathologies, etc. ».

Pour Danièle Fescia, deux autres faits marquants doivent être soulignés : le métissage culturel et social de l’école instaure le principe de diversité absolue (genre, nature des activités, variété des réponses aux stimuli éducatifs). Tout ceci diversifie, enrichit les échanges et multiplie les intelligences.

Danièle Fescia - EchoRadar 2015(Danièle Fescia)

En outre, l’équilibre du tout petit se construit également dans le foyer parental qui peut, dans certains cas, connaître des difficultés. Les parents des petites sections sont jeunes (moyenne d’âge : 20-25 ans), parfois porteurs de problèmes telles que difficultés financières, familiales, chômage ; mais aussi d’une ambition sociale excessive pour l’enfant et pour lequel, comme elle le dit : il faudrait « un peu moins de gravité » en général. Nous avons tous un passé avec l’école qu’il soit bon ou non. Celui-ci déterminera la relation parent /enseignant, parent /école.

Il faut, dit-elle « promouvoir l’alliance entre l’éducation parentale et l’éducation scolaire. Les parents et l’enseignante doivent travailler ensemble sachant que l’enseignante ne doit pas se substituer au rôle éducatif des parents. Le parent, lui, doit respecter le professionnel qu’est l’enseignant. Les parents sont parfois trop en demande vis-à-vis de l’école. D’autres se sentent peu concernés, notamment en maternelle, encore trop souvent considérée comme une « garderie ». Il y a un changement notable dans les vœux formulés par les parents inquiets du devenir de leurs enfants. Pendant très longtemps, ils ont voulu qu’ils aillent à l’école pour avoir plus tard, une « très bonne situation » professionnelle… C’est-à-dire meilleure que la leur. Aujourd’hui, il y a aussi des parents désireux d’avoir des enfants épanouis, même à l’école, ce qui n’est pas tout à fait le même programme. Un enfant épanoui est beaucoup plus responsable globalement. Il s’adapte plus facilement aux changements parce qu’il a confiance. Continuer à leur proposer de faire des châteaux de sable sur la plage est salutaire et pour le petit, et pour le parent. Ce sont avant tout des enfants. Ils sont de futurs adultes… Ne précipitons pas les choses ». Même si…

Observations

Danièle Fescia note que du point de vue du comportement individuel, la petite section trouve de plus en plus son équilibre dans le foisonnement et la diversité des activités. Elle « zappe » très rapidement d’un sujet à un autre et la notion de vitesse est importante. « Le temps de concentration est souvent court rapport à leur âge. Par exemple, certains tous petits ne supportent pas de ne pas pouvoir terminer une action en une seule fois, en un seul clic. Le petit est parfois très obstiné, « sans filtre », et pose des questions qui ne sont jamais anodines… La petite section pose les bases du développement du vocabulaire, du langage, ce qui lui permettra de s’interroger et de s’exprimer ».

Du point de vue collectif, il y a un intérêt comportemental évident pour le vivre ensemble et l’absence de jugement.

« Lorsque l’on industrialise l’enseignement et que la notion de « sur-mesure/haute-couture », je veux dire la prise en compte à la fois des besoins du groupe, mais aussi de chacun des membres qui le compose n’existe pas, les enfants peuvent être confrontés à des difficultés qui entrainent certains troubles du comportement, voire le « décrochage » ».

Pour adapter sa pédagogie, Danièle Fescia ne compte pas ses heures « il faut dépenser une énergie folle pour respecter tout cela. Je n’ai jamais assez de temps même si j’exerce dix heures par jour, mais le résultat est là et il est de mon devoir de faire le maximum car l’institutrice, faut-il le rappeler ?, est le premier maillon de l’éducation ».

Le numérique dans les petites sections Côté petits enfants, ils aiment et vivent la connexion de manière naturelle. Côté institutrice, Danièle Fescia se livre avec une grande sincérité en expliquant qu’elle n’a pas le temps d’aller chercher les informations, et qu’elle n’est pas formée pour enseigner le numérique. Elle estime que les textes fondamentaux devraient être envoyés aux institutrices qui sont prioritairement sur le terrain. Les changements d’éducation introduisent aussi, dans les petites sections, des problèmes d’ergonomie. « Tout est bas, au ras du sol ! Ce qui provoque de nombreuses pathologies dorsales chez les institutrices, ainsi qu’une certaine position corporelle qui ne va pas dans le sens de l’échange. Jadis, le pupitre était légèrement incliné. L’enfant était en lien à la fois avec son travail et avec le regard de l’instituteur. Il y a fort à faire en ergonomie ». Construction des idéaux chez l’Enfant du numérique

Le monde numérique dans lequel vivent les tous petits, chez eux et à l’école, a de fortes influences sur leurs comportements et leurs références mythologiques, dont on observe ici qu’elles sont les mêmes que celles déjà construites par la génération précédente.

Danièle Fescia note en effet une attirance accrue pour l’héroïsme. L’imagerie regorge de chevaliers et de princesses de supers héros. Ce sont des défenseurs qui gagnent.

Le personnage, qui peut être initialement obscur, méchant et destructif, gagne son statut de héros en dépassant les épreuves. Il change en devenant lumineux, gentil et constructif.

Léo Loison, 15 ans, a accepté de nous répondre sur ce point afin de préciser le sens de tout cela : « Tous les êtres humains sont des héros mais tous ne le savent pas, et ne peuvent donc pas vivre leur héroïsme. On ne juge pas un héros. Il est tel qu’il est. Les jeux et les films que nous aimons nous entraînent à changer de points de vue pour nous mettre dans la peau des autres pour les comprendre. Le plus intéressant, c’est de regarder quels sont les comportements et les façons de penser du héros, comment il vit les épreuves ». Léo nous cite en exemple film Maléfique [6].

Dans sa conception, « ce ne sont pas les gens les plus populaires qui sont les plus intelligents. Le héros ne se laisse pas duper par le matérialisme, il fait beaucoup de choses non rémunérées. Il résout les problèmes rapidement. Il n’agit pas de manière isolée, il est en réseau. Le héros a un pouvoir visuel très puissant ».

Conclusion

Il est fondamental, lorsque l’on étudie l’anthropologie numérique, les Enfants du numérique et les Digital Migrants qui représentent 70% des Êtres dits « connectés » sur la planète, de ne pas oublier que tout le culturel pousse et se forge dans la petite enfance, dès l’école maternelle. Les nouveaux programmes mettent en avant la progression de l’Enfant.

Ces premières années de contact avec l’institution, incarnée par l’institutrice, sont fondamentales en tant que base de construction, d’intégration et de devenir du petit d’homme. Elle joue un rôle clé en inculquant des valeurs fortes, et son service aux autres rappelle que l’éducation et l’enseignement sont des armes de défense et de protections sociales déterminantes dans toutes les organisations humaines.

Isabelle Tisserand, anthropologue médical

[1] Appel à labellisation de la Grande École du Numérique – Clôture le 19 octobre 2015. http://www.experimentation.jeunes.gouv.fr/1513-appel-a-labellisation-de-la-grande-ecole-du-numerique-apgen.html La Grande École du numérique vise à structurer sur l’ensemble du territoire national une offre de formations, « les fabriques du numérique », permettant la diversification des publics concernés et renouvelant les approches pédagogiques. Elle a pour objectif la reconnaissance de ces formations par une certification ainsi que l’adaptation de ces formations aux besoins d’un secteur d’activité en mutation permanente.

[2] http://www.lien-social.com/La-collectivite-peut-etre-le-revelateur-du-handicap [3] Régine Bramnik. http://www.lien-social.com/La-collectivite-peut-etre-le-revelateur-du-handicap

[4] La notion de « Care » a été décrite par le Dr Laurent-Melchior Martinez, référent des Commandos de la Marine Nationale dans l’ouvrage « Sécurité alternative » (page 81), mai 2014, l’Harmattan, Paris.

[5] En 2013, 82% des enseignants de l’école primaire (élémentaire + maternelle) sont des femmes. [6] Maléfique, Film fantastique de Robert Stomberg, 2014.  ]]>

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