Se lancer dans la lecture de Soljenitsyne, c’est accepter de se prendre un choc, intense, violent, difficilement supportable parfois, presque à chacune de ses pages. C’est partager, voire ressentir, ce qu’il a vécu, ce qu’il a vu. Accepter de plonger avec lui dans les tréfonds de l’être humain pour y côtoyer et comprendre la maladie et les rapports entre soignant et soigné (Le pavillon des cancéreux), la souffrance et la condition humaine (L’archipel du goulag) et le mensonge (Discours de Harvard, Révolution et mensonge).
C’est se plonger dans une lecture qui ne laisse pas indemne et au terme de laquelle on comprend, quand bien même seule une traduction permet d’accéder à son œuvre, qu’il a pu recevoir le prix Nobel de littérature, tant sa description de l’homme, de ses contraintes, de ses envies et de ses paradoxes est universelle.
Si L’archipel du goulag sera au centre des lignes qui suivent, d’autres parties de son œuvre pourront apporter des précisions ou des compléments au propos principal. Des références à d’autres œuvres de la littérature concentrationnaire parsèmeront également ces lignes.
La réception de l’œuvre de Soljenitsyne
Cette œuvre ne pouvait passer inaperçue. Une telle dénonciation d’un système concentrationnaire alors que l’Europe venait de se relever du nazisme et que certains voulaient encore croire et faire croire aux « lendemains qui chantent » ne pouvait valoir qu’à son auteur un abondant lot de reproches et de condamnations.
Soljenitsyne en était conscient, et plusieurs extraits de lettres de reproches que lui ont adressé des citoyens soviétiques sont d’ailleurs citées dans ses lignes.
La réception interne
Soljenitsyne fut pris à partie, parfois violemment, par des soviétiques lui reprochant de prendre la défense de bons à rien qui avaient mérité le goulag. Ce qui ne manque pas de sel lorsqu’on sait qu’au goulag se trouvaient également ceux que l’auteur appelle des orthodoxes, non en raison de leur foi, mais de leur dévotion au parti. Ces communistes victimes d’un système qu’ils appelaient pourtant de leurs vœux se consolaient en se persuadant que Staline n’était pas au courant de ce qu’ils vivaient et que, dès qu’il le saurait, il ferait libérer ses camarades.
Mais ils demeurèrent des ennemis du peuple qui purgèrent leur peine.
Dans d’autres lettres lui furent adressées, les auteurs justifiaient la faible ration de nourriture accordée aux zeks, en exposant que celui qui ne travaillait pas ne devait pas être nourri. Principe de bon sens dira-t-on, qui peut néanmoins prendre une autre signification lorsque le travail est forcé et qu’il doit être exécuté par des températures négatives, voire très négatives. Et encore, à l’époque, on ne parlait que de la température affichée par le thermomètre, pas de celle ressentie1.
Des gardiens de camps, mis en cause par Soljenitsyne pour leur inhumanité voire leur corruption, lui ont également adressé des reproches après la parution d’Une journée d’Ivan Denissovitch roman décrivant la vie dans les camps : « nous sommes aussi des hommes, nous autres les exécutants, nous aussi nous avons su accomplir des actes héroïques nous n’achevions pas toujours les détenus qui tombaient et prenions ainsi le risque de perdre notre travail2. »
On peut se demander dans quel sens il faut comprendre le « nous n’achevions pas toujours ». Est-ce à dire que certains ne l’ont jamais fait, ou que si c’était la règle habituelle, elle a souffert (pardon du jeu de mots) quelques exceptions qui devraient valoir brevet d’humanité et de compassion et donc absolution à leur auteur ?
Ce qui induit la question : peut-on rester humain en se mettant au service d’un système inhumain et qu’on reconnaît comme tel ?
Le passage, encore actuel, devant les tribunaux des gardiens de camps nazis donne une orientation quant à la réponse judiciaire réservée à ces personnes.
La réception externe
Si l’on comprend que la réception interne ne pouvait être favorable, quand bien même le culte de la personnalité n’existait plus, tant l’œuvre estimait le régime des camps indissociable du communisme, on pouvait penser qu’elle serait bien reçue dans le « camp de la liberté » qui ne s’est appelé ainsi que bien plus tard.
Pourtant, l’Histoire nous apprend que les premières relations entre l’URSS et les USA n’étaient pas celles d’une confrontation à l’image de celle de la guerre froide. L’auteur le sait, et il cite d’ailleurs à titre d’exemple les visites en terre russe de magistrats américains qui ne trouvèrent rien à redire au système judiciaire soviétique.
On pourrait également citer la construction de la ville de Magnitogorsk pour laquelle des urbanistes américains furent mis à contribution, la cité devant s’inspirer de celle de Gary (Indiana), suite à l’accord conclu avec la US Steel. Cette coopération urbaniste entre le régime des soviets et les représentants du « camp de la liberté » dura quand même de 1928 à 1937.
L’auteur se doutait que la réception de son œuvre en Occident poserait problème, car il écrivait « L’Europe, bien sûr, n’en croira rien. Tant qu’elle n’y aura pas elle-même été, elle n’y croira pas. Elle a cru en nos revues sur papier glacé, impossible de lui faire entrer autre chose en tête3. »
L’opposition fut d’ailleurs violente.
En France, le parti communiste encore puissant4 s’efforça de minimiser la portée du récit. Quand bien même il déclara « Il ne s’agit nullement, quant à nous, de contester le droit de Soljenitsyne de s’exprimer5 » le premier secrétaire de l’époque circonscrit les faits à une époque particulière de l’histoire de l’URSS en déclarant ne « voir aucun fait qui justifie l’appréciation selon laquelle nous assisterions à un retour aux méthodes staliniennes » En septembre, l’Humanité poursuivit dans le même registre en écrivant « L’heure est à la lutte pour vivre mieux, l’anticommunisme divise. » Par la suite, le parti mit en avant la liberté d’expression en vigueur en URSS puisque l’Archipel y avait été publié « Dans le même moment où il crie à la répression, Soljenitsyne se fait photographier dans son appartement de Moscou avec ses deux enfants émouvants. Il se multiplie en conférences de presse, en déclarations, en appels, en communications téléphoniques avec l’étranger. C’en est même gênant car, à force de parler et d’écrire, Soljenitsyne après Sakharov, révèle de plus en plus ses convictions politiques, rétrogrades, réactionnaires. Et puis l’état actuel des choses contredit trop l’image qu’on donne d’un homme persécuté6 », ainsi que les sympathies nazies (selon les communistes de France) de l’auteur « Dans sa détestation de l’Union Soviétique et de Staline en particulier, Soljenitsyne en vient à plaider pour Vlassov et ceux qui le suivirent, (…) un traître condamné comme tel après la guerre. Une grande partie du chapitre intitulé “Ce printemps là” constitue un plaidoyer en faveur de Vlassov et de ses hommes. C’est Staline qui, par sa politique, les aurait poussés à cet acte… Et voilà les traîtres réhabilités7. » Georges Marchais enfonçant le clou à la télé en déclarant « seule chose nouvelle que nous trouvons dans l’ouvrage de cet écrivain admiré du monde capitaliste, c’est un éloge du traître Vlassov. »
Aux USA, l’enthousiasme ne fut pas unanime puisque Moshe Lewin8, ancien citoyen soviétique, soviétologue, lui réserva un accueil mitigé et déclara encore en 2003 « Un livre comme L’Archipel du Goulag lancé à la face du régime soviétique peut être considéré comme une claque politico-littéraire, signifiant la condamnation d’un système qui a trahi ses propres idéaux […]. Mais l’écrivain ne laissait à aucun moment entendre qu’au moment où il publiait son livre, le Goulag qu’il avait connu n’existait plus… Le dire aurait été un acte d’honnêteté politique et aurait exigé de sa part une analyse approfondie du système, assortie d’un argumentaire sur la période post-stalinienne. Il ne l’a pas fait, cela n’avait pas d’importance pour lui. Il était beaucoup plus simple d’attaquer l’Union soviétique pour son passé stalinien, et de servir par là sa propre image. Car Soljenitsyne se considérait comme le dépositaire de valeurs supérieures héritées du passé de la Russie, et c’était en référence à ce passé qu’il entendait proposer des remèdes à la Russie du XXe siècle. » Si tout n’est pas faux dans cette déclaration, on peut noter la savoureuse remarque le Goulag qu’il avait connu n’existait plus, ce qui laisse penser que le goulag existait encore. Moins dur ou plus dur, ce n’est pas dit… De même, on note que la phase stalinienne devrait être considérée, selon Lewin, comme une parenthèse regrettable d’un système qui, finalement, n’était pas si mal que cela.
On peut cependant estimer que Lewin avait sûrement des biais de raisonnement. Ses parents, d’origine juive, ont été assassinés par les milices d’extrême droite lituaniennes lors de l’invasion allemande9, et il a lui-même quitté l’URSS en 1945, à une époque où tout le monde ne pouvait pas le faire.
Soljenitsyne montre le peu de bien qu’il pense de Lewin dans « L’erreur de l’occident » lorsqu’il indique que Lewin qualifiait les premiers résistants au soviétisme de « bandits »…
Cette opposition au récit, Soljenitsyne l’explique par un long développement du proverbe il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre, plus particulièrement destiné à l’intelligentsia occidentale : « Ô penseurs occidentaux de gauche si épris de liberté ! Ô travaillistes de gauche ! Ô étudiants progressistes d’Amérique, d’Allemagne de France ! Tout cela n’est pas encore assez pour vous. Tout ce que renferme ce livre, vous allez le compter pour rien. Vous ne comprendrez – mais alors ce sera d’un seul coup – que le jour où, les mains derrière le dos, vous partirez vous-même pour notre archipel10. »
Exilé sur le territoire américain après son expulsion d’URSS, l’auteur se rendit compte qu’il n’avait été soutenu que parce qu’il avait été considéré comme un opposant politique et non à cause de la nature de son œuvre. La réception de son discours prononcé à Harvard le prouve.
Le goulag est-il une création stalinienne ?
La fraîcheur de la réception pourrait s’expliquer par le fait que Soljenitsyne n’aurait rien compris au communisme. Assimiler le goulag à ce régime en serait d’ailleurs la preuve, le communisme étant pur, seul Staline l’ayant perverti.
Ce qui serait néanmoins étonnant, car Soljenitsyne a grandi en bon citoyen soviétique, membre des komsomols il a défilé pour célébrer les anniversaires de la révolution d’Octobre et ne s’est pas dérobé à l’appel de la patrie lorsque le fascisme la menaçait.
Il n’est pas non plus passé chez les Vlassoviens pour tenter de mettre à bas le régime communiste en profitant des combats contre le nazisme, quand bien même il a été taxé de sympathies vlassoviennes par ses contradicteurs.
Son arrestation n’est pas due à un anti-soviétisme, mais au fait que la correspondance avec un de ses amis dans laquelle il estimait Staline piètre stratège militaire11, a été interceptée et ouverte.
C’est donc en tant qu’officier soviétique fier de son combat contre le fascisme que Soljenitsyne a été arrêté puis a fait connaissance avec l’univers concentrationnaire… Pour preuve le fait que dans la colonne de prisonniers encadrée par des sous-officiers, il estimait indigne d’un officier soviétique de porter lui-même sa valise : l’escorte refusant de la porter, il la fit porter par un civil allemand, prisonnier. L’Allemand dut s’exécuter, et l’escorte ne dit rien.
C’est ainsi d’un communiste, repenti ou traître selon le point de vue, qu’est venue la plus grande condamnation du système. Et celle-ci s’est appuyée, non seulement sur des faits, mais aussi sur une enquête approfondie, dans la mesure où les Organes lui laissaient la possibilité d’y travailler : Soljenitsyne explique qu’il dut prendre de nombreuses précautions pour récolter des témoignages d’anciens zeks et éviter que son œuvre soit saisie et détruite par la police.
La révolution et les camps
À rebours des thuriféraires du communisme, l’auteur estime que les camps sont indissociables de la révolution d’Octobre et du régime qu’elle a instauré : « On peut donc dire que c’est bien de cette instruction du 23 juillet 1918 (neuf mois après la Révolution d’Octobre) que procèdent les camps et qu’est né l’archipel12 », les instructions qui suivirent ne faisant qu’asseoir plus solidement les camps, nommés par euphémisme établissements de redressement par le travail : « À l’époque de l’entrée dans le socialisme, le rôle des établissements de redressement par le travail en tant qu’instruments de la dictature du prolétariat, qu’organes de répression, que moyens de contrainte et d’éducation doit s’accroître et se renforcer encore13. »
La révolution s’étant construite à partir de la théorie de la lutte des classes (les exploités contre les exploitants), il était alors logique qu’une fois qu’elle avait instauré un régime propice à accomplir ses promesses, elle combatte ses ennemis qui ne pouvaient être que des ennemis de classe.
Ceci dit, la question des moyens à mettre en œuvre pour faire passer les ennemis dans le camp du nouveau bien se pose. Le problème est en fait (quasiment) insoluble : « Les socialement étrangers, en effet, sont à peu près incapables de redressement tant ils sont invétérés dans leur corruption de classe. Dans leur majorité, ils ne peuvent être redressés que par la tombe. Que si une certaine minorité est susceptible de redressement, ce n’est bien entendu que par le travail, et le travail physique pénible (celui qui remplace les machines), le travail qui humilierait un officier ou un surveillant de camp, mais qui n’en a pas moins fait l’homme à partir du singe (et, dans les camps et de façon inexplicable, le retransforme en singe)14. »
Un cas particulier demeure, celui des détenus politiques, condamnés en vertu de l’article 58 du code pénal soviétique (dans lequel sont inclus à peu près tous les délits imaginables, y compris ceux qui ne sont pas encore commis). Était-il possible de les redresser afin d’en faire de parfaits soviétiques une fois leur peine accomplie ? L’auteur estime que non : « D’ailleurs, on n’a jamais cherché à corriger les 58, c’est-à-dire à ne pas les emprisonner une seconde fois. Nous avons déjà cité les déclarations sans ambiguïté de nos carcérologues à ce sujet. On voulait exterminer les 58 par le travail. Que nous restions en vie, cela relevait de notre initiative personnelle15 », la relégation faisant suite à l’accomplissement de leur peine en étant une preuve supplémentaire.
La révolution étant permanente et devant tendre vers une société sans classes, tous ceux qui s’y opposent doivent être emprisonnés puisqu’il est impossible de les redresser. Mais, selon l’auteur, ce raisonnement aboutit à une conclusion radicale, et paradoxale pour un régime qui déclare travailler pour le peuple : « Quand à ceux qui sont coffrés, eh bien, ce sont des kaers, des ennemis de la révolution. Les années aidant, le mot de révolution a perdu de son panache, d’accord, disons qu’il s’agit d’ennemis du peuple, ça sonne encore mieux. Additionnons ensemble, d’après la revue que nous avons faite de nos flots, tous les coffrés de cet article, ajoutons-y, multiplié par 3, le même nombre de membres de la famille, exilés, suspects, humiliés, persécutés, et nous voici amené à admettre avec étonnement que, pour la première fois dans l’histoire, le peuple est devenu son propre ennemi, tout en ayant acquis, en revanche, son meilleur ami : la police secrète16. »
Il explique néanmoins cette apparente contradiction dans une autre œuvre : « Les Roussaniv aimaient le peuple, leur grand peuple. Ils servaient ce peuple, ils étaient prêts à donner leur vie pour le peuple. Mais, d’année en année, ils devenaient de moins en moins capables de supporter… la population17. »
Après la mort de Staline
L’auteur ajoute que, même après la mort du petit père des peuples (1953), le goulag a poursuivi son œuvre mortifère. Mais s’il était lié à Staline et non au communisme, n’aurait-il donc pas dû s’arrêter avec le décès du guide ?
Une brise de liberté souffla effectivement dans les camps après cet événement, causant une inquiétude certaine dans les rangs de l’administration du goulag : « Cependant, la panique des agents d’exécution n’était pas sans fondement : les années 1955-1956 virent dans le ciel de l’archipel une extraordinaire conjonction astrale. Ce furent des années fatidiques, qui eussent pu être les dernières de son existence18 ! » L’espérance des détenus était forte, la désorientation des gardiens telle que les détenus partaient travailler sans même être escortés aussi lourdement qu’avant, et les gardiens, étonnamment, prenaient en compte certaines demandes des détenus.
Des gardiens de camps se plaignirent même que certains zeks les traitaient de bérianistes après la chute de ce dernier19. Ce qui leur valut comme réponse « tu me traites bien de fasciste tous les jours » et il s’ensuivit un modus vivendi : l’abandon de l’injure bérianiste contre l’abandon de celle de fasciste…
Cependant, la brise retomba, le goulag demeura, et une des preuves de l’intrication du goulag et du communisme fut l’absence de jugement pour les organisateurs et exécutants, au motif qu’ils n’avaient fait qu’appliquer les ordres. Ils furent d’ailleurs reconduits à leur poste. Alors que si la déstalinisation avait été totale, la hiérarchie des camps auraient dû répondre de ses actes devant la justice. « Les agents d’exécution ne faisaient qu’accomplir ce qu’exigeaient d’eux les règlements, les instructions, les consignes. C’est du reste toujours le même personnel qui assure le service actuellement, ils sont seulement peut-être 10 % de plus, et leur bon travail leur a valu plus d’une fois des encouragements, ils sont appréciés de leurs supérieurs20. »
Mais la reconduction des fonctionnaires est parfois indispensable à la bonne marche de l’État, et le gouvernement communiste n’hésita d’ailleurs pas à conserver des gardiens de prison de l’époque tsariste.
D’autres éléments incitent cependant l’auteur à penser que la mort de Staline, après avoir plongé le régime dans une période d’incertitude, n’a pas eu d’effet notable sur l’existence et le fonctionnement de ce système concentrationnaire et post-concentrationnaire : « Une institutrice nommée Deieva a été révoquée pour corruption morale : elle avait porté atteinte au prestige des instituteurs en se mariant avec un ancien détenu qui, au camp, avait été son élève. Quand cela s’est produit, on n’était plus sous Staline, on était sous Khrouchtchev.21 »
Ce qui l’amène à en tirer une double leçon :
– la commission de délestage chargée d’enquêter sur les camps ne fut, en prenant en compte le long terme, qu’un alibi pour un régime soucieux de se maintenir à tout prix : « La commission de délestage, c’est un concierge soucieux de propreté qui suit dans la cour les traces de vomi laissées par Staline et les essuie soigneusement un point c’est tout. Ce n’est pas cela qui va doter la société de nouvelles bases morales22. »
– le culte de la personnalité, évoqué pour expliquer les excès de l’ère stalinienne n’est, lui aussi qu’un alibi « Commode, le culte de la personnalité on profère cela et on croit avoir expliqué quelque chose23 » qui ne cache qu’imparfaitement un autre problème : « Un de nos poètes a eu ce mot d’esprit : nous avons connu le culte non pas de la personnalité, mais du dédoublement de la personnalité24 » ;
et sa conclusion sur le régime étant sans appel : « Voici plus de 50 ans que se dresse cet état énorme maintenu par des cercles d’acier : les cercles d’acier sont là, mais de loi, il n’y en a pas25. »
D’ailleurs, à propos du culte de la personnalité, c’est aller un peu vite en besogne que de l’imputer au seul Staline. Saint Petersbourg a été rebaptisée Leningrad en 1924 à la mort de Lénine, Lénine a eu un mausolée sur la place rouge, et les paroles du poème d’Alexandre Bezymenski intégré dans la symphonie Octobre de Chostakovitch écrite en 1927 sont peu équivoques : « Oh, Lénine! Tu as forgé la volonté aux souffrances de la grande douleur des mains calleuses. » « Nous avons compris, Lénine, notre destin porte le nom suivant : la lutte, la lutte ! »
Peut-on donc donner tort à Soljenitsyne lorsqu’il reprend ce mot de l’époque stalinienne : « Staline, c’est Lénine aujourd’hui » ?
Informatiques orphelines
1Cf. wikipedia : En hiver, la sensation de froid est plus vive en présence de vent que par temps calme. Ceci est dû à deux facteurs : d’une part, le vent balaye la mince couche d’air chaud formée par rayonnement juste au-dessus de la peau, d’autre part, privée de cet isolant, l’humidité de la peau s’évapore pour accentuer encore le refroidissement. La combinaison de ces deux facteurs conduit à la formule de la température ressentie. Par exemple pour une température de −10° et un vent de 30 km/h, l’indice est de -20°, ce qui signifie que la sensation de froid est – approximativement – équivalente à celle ressentie à une température ambiante de −20° par une journée sans vent sur la peau nue. Ceci ne s’applique pas aux parties vêtues d’une personne qui, par définition, ne ressentent pas le vent.
2Tome 3, p 385.
3Tome 2, p 228.
4La publication en France eut lieu en 1973.
5Yves Moreau in L’Humanité, 29/08/73.
6In L’Humanité, 23/01/74.
7In L’Humanité, 17/01/74).
10Tome 3, p 443.
11On ne peut lui donner entièrement tort, d’ailleurs.
12Tome 2, p 13.
13Tome 2, p 95. Reprise de la préface du Recueil des prisons aux établissements éducatif édition la législation soviétique, Moscou 1934.
14Tome 2, p 192.
15Tome 2, p 467.
16Tome 2, p 221.
17In Le pavillon des cancéreux, p 274.
18Tome 3, p 410.
19Lavrenti Pavlovitch Beria (en géorgien : ლავრენტი პავლეს ძე ბერია ; en russe : Лавре́нтий Па́влович Бе́рия), né le 29 mars 1899 à Merkheoul (actuelle république séparatiste d’Abkhazie) et mort le 23 décembre 1953 à Moscou, a tenu un rôle primordial dans l’organisation industrielle du Goulag, la répression de la désertion lors de la Seconde Guerre mondiale — il est le créateur du SMERSH —, le développement d’un réseau d’espionnage international performant et la répression dans les États satellites (comme dans l’exemple des procès de Prague). En 1953, alors que Staline a déjà programmé son élimination en montant de toutes pièces un « complot mingrélien », la mort du dictateur le sauve in extremis. Il prononce son éloge funèbre sur la place rouge. Quelques mois plus tard, alors qu’il est premier vice-président du Conseil des ministres de l’Union soviétique et prépare sa prise du pouvoir, il est piégé par les autres membres du Politburo à l’occasion d’une réunion de routine au Kremlin, arrêté et exécuté. Sa mort marque le début de la déstalinisation.
20Tome 3, p 385.
21Tome 3, p 366. Staline mourut en mars 1953 et le XX° congrès du PCUS au cours duquel la déstalinisation fut lancée débuta le 14 février 1956.
22Tome 3, p 409.
23Tome 3, p 387.
24Tome 2, p 481.
25Tome 3, p 451.